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BLOG du projet "11 septembre 2001" lycée Jean Renoir

lundi 12 septembre 2011

ON EN PARLE dans Agoravox

Théâtre à l’Antique ?

Dans les commémorations de la destruction des Twin Towers de Manhattan, il y a une mise en scène remarquable du texte de Michel Vinaver 11 septembre 2011. Ce spectacle qui a encore quelques représentations devant lui rassemble sur scène un "fragment du peuple de la Terre" pour représenter un événement qui atteint le peuple de la Terre en son entier. C'est un des aspects de sa réussite.
L'autre aspect, cela va mieux en le disant, est la force et la beauté de ce qui est donné à voir et à entendre, la force et la beauté de ces jeunes acteurs qui seront demain les adultes de notre planète.
Au Théâtre de la Ville, quarante-quatre lycéens jouent la pièce chorale de Michel Vinaver, 11 septembre 2001, mise en scène par Arnaud Meunier. C’est une pièce patchwork, écrite non pas à partir des mots, seulement, mais à partir d’articles de journaux, principalement du Herald Tribune, des témoignages, les paroles de Bush et Ben Laben…
Ainsi le texte vient déjà d’une sorte de collectif. Les « briques » de ce texte sont déjà des textes divers en lien avec l’événement. Dans cette forme, nous n’aurons pas la parole des morts, celles et ceux qui ont couru et n’ont pu s’échapper. Pas de fiction.
Michel Vinaver explique que le dramaturge n’a pas à raconter l’histoire que tout le monde connait et peut concentrer son attention sur ce qu’il veut, ici sur ce qu’il se passe vraiment. Il a voulu garder une empreinte, selon son mot, de l’événement.
Ce texte qui est déjà la mise en forme théâtrale de textes déjà là, qui prend la forme de l’expression d’un chœur, pas de personnages, quelques personnages éphémères dont on suit le parcours un moment, comme le groupe des miraculés de l’ascenseur, ce texte est dit par un groupe de jeunes personnes, de jeunes citoyens de la banlieue.
La banlieue de nos grandes villes, dont celle de Paris, est l’objet d’un souci qui s’exprime dans des discours assez peu efficients, loin du réel. La banlieue reste méconnue et mal appréhendée. Arnaud Meunier a choisis ces acteurs-là, il a voulu travailler avec ces jeunes gens, les faire travailler. Ils sont une représentation de notre humanité, sa diversité et son unité. Ils sont une réalisation du rassemblement des hommes dans un seul monde, sur une petite planète. Ils sont un concentré du peuple humain, avec une vingtaine d’origines différentes. Ils sont une figure de l’universalité humaine « décloisonnée », avec toutes sortes de conséquences difficiles à comprendre et à gérer parce que nous n’avons pas d’antécédent. Des actes de guerre nous atteignent tous immédiatement. (je prends le mot guerre pour signifier tous les combats qui n’ont pas d’autres règles que d’obtenir la victoire, en ce sens, le terrorisme est une forme de guerre. En ce sens, la guerre est la barbarie).
Dans le travail, ils ont mis en avant la bienveillance comme valeur nécessaire : ne pas trop compter fort à l’autre ses erreurs, ses imperfections ; lui faire crédit qu’il peut changer et s’améliorer, qu’il va changer et s’améliorer. Celles et ceux qui ont entrepris le travail étaient plus nombreux que celles et ceux qui sont allés jusqu’au bout. Tous les jeunes qui ont voulu être dans le spectacle l’ont été. Ils ont tous été intégrés, ils ont pris une place à partir de ce qu’ils pouvaient, voulaient, savaient faire.
L’association Citoyenneté Jeunesse a apporté son concours. Une des craintes que suscitait le projet était de voir se reproduire et s’exacerber les conflits sous-tendant l’événement narré. Il n’en fut rien.
11 septembre 2011 a tissé d’un bout à l’autre du travail de création les éléments du fond et de la forme, (tout du long, la mondialisation de l’humanité est en jeu…)  pour donner un spectacle parfaitement abouti. On ne peut tenir pour des maladresses la façon de dire de ces jeunes, ils ne sont pas en manque d’une technique professionnelle, ils donnent à entendre le texte, ils donnent à voir les personnages « fugitifs » avec toute la générosité qu’il faut pour qu’ils nous parviennent sans effort.
Un dispositif de poutrelles rouges, avec passerelles… qui m’a fait penser à West Side Story pour ma part, des musiques habilement choisies, des passages en Anglais, New-York, New-York en fin remarquablement chanté… une scène « chorégraphique » où tous ces jeunes gens circulent et enlèvent leurs habits qui semblent ceux du quotidien pour revêtir les vêtements de leurs rôles, des « traders » surtout… s’ajoutent à la présence des acteurs pour faire de ce spectacle, un événement théâtral complet, civilisationnel (?) contre un acte de guerre sans précédent et espérons-le qui restera unique.
En ce sens, l’empreinte devient marque.